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Loi pour une République numérique – Le consommateur mieux protégé

La loi pour une République numérique, promulguée à l’automne 2016, protège mieux les « e-consommateurs ». Voici ses principales dispositions :

Cette année, Axelle Lemaire a reçu son cadeau ­d’anniversaire dix jours en avance. Alors qu’elle s’apprêtait à souffler sa 42e bougie, la secrétaire d’État chargée du numérique a vu la loi qu’elle portait depuis deux ans entrer en vigueur. Depuis le 8 octobre 2016 et la publication du texte au Journal officiel, la France dispose donc d’une législation pour mieux encadrer notre société numérique. Services publics, recherche, e-sport… les secteurs abordés sont ­nombreux et la loi réforme plusieurs codes (tourisme, consommation, postes et télécommunications, ou encore relations entre le public et l’administration). Avec elle, le gouvernement veut stimuler l’innovation. Les « e-consommateurs » que nous sommes devenus sont aussi concernés. La loi Lemaire vise en effet à rassurer les Français et à mieux les protéger dans leur utilisation quotidienne d’Internet. Sites marchands, réseaux sociaux ou ­intermédiaires de services vont ainsi être soumis à de nouvelles obligations pour mieux informer l’internaute et lui faciliter la vie au quotidien. Les sites Web devront, par exemple, expliciter clairement comment ils classent les résultats qu’ils affichent et si des liens commerciaux influencent les résultats (« loyauté des plateformes »). Plusieurs dispositions touchent à la protection des données personnelles (mort numérique, droit à l’oubli des mineurs, portabilité des données) ; mais elles ne font qu’anticiper la législation européenne, adoptée en avril 2016, qui entrera en vigueur en mai 2018. Une quarantaine d’articles de cette nouvelle loi attendent encore qu’un décret en précise les modalités d’application. Ils devraient être publiés d’ici au printemps 2017. À moins que souffler les bougies trop tôt n’ait finalement porté la poisse au calendrier.

Mort numérique – Exprimez vos dernières volontés

Aujourd’hui la gestion, après leur mort, des diverses données mises en ligne par les consommateurs pose problème. D’abord, les héritiers n’en ont pas toujours connaissance ; ensuite, ils se heurtent, concernant les données personnelles, au refus des plateformes qui, même dans le cadre d’une succession, n’ont pas le droit de les transmettre. Certains sites, comme Facebook et Google, permettent déjà à leurs utilisateurs de prendre les devants. Avec la loi Lemaire, chacun pourra ­exprimer de son vivant ses volontés sur la conservation et la communication de ses données après son décès. Une personne pourra être désignée pour exécuter ces directives. Reste à voir comment seront gérées, concrètement, ces dernières volontés(stockage, référencement, etc.).

Effacement des données – Un droit pour les mineurs

Les erreurs de jeunesses des internautes pourront être corrigées, en tout cas celles qui concernent des publications hasardeuses sur les réseaux sociaux ou des informations périmées ou équivoques diffusées sur Internet. S’ils étaient mineurs au moment des faits, les internautes pourront demander à ne plus apparaître dans les résultats des moteurs de recherche. ­Rappelons que ce « droit à l’oubli numérique » est plutôt un droit à l’« effacement ». Les données compromettantes ne disparaissent pas, simplement elles ne sont plus référencées par les moteurs de recherche. Les sites pourront invoquer le droit à l’information et à la liberté d’expression pour refuser la demande. En cas de désaccord, l’internaute pourra saisir la Cnil (Commission nationale de l’informatique et des libertés), qui aura trois semaines pour répondre.

Loyauté des plateformes – Les relations commerciales au grand jour.

Au quotidien, Internet est devenu incontournable : réserver une chambre d’hôtel, acheter un appartement, comparer des prix, ou encore trouver un covoiturage passe désormais par la Toile. À chaque fois, des intermédiaires font le lien avec le consommateur : ce sont les « plateformes ». Derrière cette appellation, la loi Lemaire englobe les moteurs de recherche, les comparateurs de prix, les marketplaces (ou places de marché), les boutiques d’applications mobiles, les sites de streaming ou les réseaux sociaux. Désormais, ces sites devront fournir « une information loyale, claire et transparente » à leurs ­utilisateurs sur leurs « modalités de référencement, de classement et de déréférencement des contenus ». Autrement dit, vous devrez être informé de toute relation commerciale ayant influencé les résultats ou leur ordre d’affichage. Cette disposition complète la loi pour la confiance dans l’économie numérique, qui impose depuis 2004 que la pub soit « identifiable », et la loi Hamon de 2014, qui appliquait des dispositions similaires aux comparateurs de prix.

Neutralité du Net – Qualité égale pour tous les services

La loi Lemaire transpose dans la législation française le principe de neutralité du Net, déjà inscrit dans la réglementation européenne. Dans la pratique, il interdit aux opérateurs de proposer des offres commerciales différentes en variant les débits, ou de détériorer la qualité de diffusion d’un site au profit d’un autre. En France, c’est l’Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) qui se chargera de sanctionner les abus.

Portabilité des données – Courriels, photos, musique en un clic

Le gouvernement entend faciliter la vie des internautes, lorsqu’ils souhaitent changer de fournisseurs de services, en leur permettant de récupérer toutes leurs données. ­Théoriquement, le champ d’application est assez vaste : documents stockés dans le cloud, photos mises en ligne sur Facebook, vidéos partagées sur Youtube, bibliothèque musicale stockée sur un site de streaming, liste de contacts et e-mails hébergés par un FAI… Le texte prévoit aussi la portabilité des données pour les autres services (bancaires, énergie, etc.). « Le consommateur dispose en toutes circonstances d’un droit de récupération de l’ensemble de ses données », dit la loi. Le texte exclut toutefois les fichiers « enrichis » par le fournisseur de service. Cette notion demeure floue, mais on peut imaginer voir entrer dans cette catégorie les photos « maquillées » de Snapchat (du type superposition d’oreilles de lapin à un visage), par exemple. La loi numérique reprend le règlement européen sur la protection des données personnelles, en y ajoutant toutefois les données non personnelles. Cette disposition entrera en vigueur en mai 2018, à la même date que le texte européen.

Avis de consommateurs – La chasse aux faux avis est ouverte

Les avis de consommateurs sont désormais incontournables : plus de 80 % des internautes en consulteraient avant de réaliser un achat sur Internet. Mais difficile de leur faire confiance tant ils sont faciles à manipuler. La loi Lemaire contraint les sites à indiquer si les avis publiés ont été contrôlés, et comment.

Droit au maintien de la connexion – Gaz, électricité… et Internet

La connexion Internet fait son entrée parmi les besoins de première nécessité, comme le gaz, l’électricité ou l’eau. En cas de défaut de paiement, les FAI devront maintenir la connexion de leurs clients le temps de l’instruction de leur demande d’aide auprès du Fonds de solidarité logement. Le code de l’action sociale et des familles, modifié par la loi Lemaire, le précise désormais. Le FAI pourra toutefois réduire le débit « sous réserve de préserver un accès fonctionnel aux services de communication au public en ligne et aux services de courrier électronique ». A priori, il désactivera surtout les services payants (numéros surtaxés, vidéo à la demande, etc.). L’aide prendra la forme d’une « remise de dette » de la part des opérateurs, plafonnée à 100 €. Les départements de Seine-Saint-Denis et de Haute-Saône expérimentent ce dispositif avant son entrée en vigueur nationale, dont la date sera fixée par décret.

Correspondances électroniques privées – Vos e-mails sont confidentiels

Jusqu’à présent, les e-mails n’étaient pas expressément inclus dans le droit concernant le secret des correspondances privées (art. 226-15 du code pénal). La loi pour une ­République numérique rectifie le tir en intégrant les e-mails et englobe également tous les messages privés échangés sur les réseaux sociaux. Les hébergeurs ne pourront plus utiliser le contenu de vos messages pour cibler la publicité qu’ils affichent sur votre écran. Méfiez-vous, un simple consentement de votre part (obtenu avec une petite case rapidement cochée) annule cette interdiction. Les hébergeurs pourront toujours analyser vos messages pour détecter des virus ou des spams.

Recommandé électronique – Équivalent au papier

La loi dispose désormais clairement que « l’envoi recommandé électronique est équivalent à l’envoi par lettre recommandée ». Cette mesure rétablit ainsi une certaine cohérence en dématérialisant la résiliation d’un contrat de bout en bout : jusqu’ici, un recommandé papier était nécessaire pour finaliser cette procédure initiée en ligne. Si le destinataire n’est pas un professionnel, il devra avoir exprimé son consentement à l’expéditeur. Le recommandé électronique aura la même valeur juridique qu’un recommandé papier. Sa mise en œuvre est donc particulièrement délicate.

 

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